Phob.Ô.folies

Commémoration


Un exemple d’homophobie au quotidien :

Le préfet de l’Isère refuse année après année la présence de CIGALE à la cérémonie de commémoration de la déportation pour représenter la mémoire des déporté-es homosexuel-les. Pourtant les circulaires données par le Ministre Délégué aux Anciens Combattants et l’Office Nationale des Anciens Combattants semblent claires sur ce sujet.

Pour plus d’informations sur la déportation des homosexuel-le-s, vous pouvez suivre les liens suivants :
- http://www.triangles-roses.org/210_...
- http://ken.ifrance.com/dossier.htm

Commémoration de la déportation des homosexuels 2008
Un bilan ouvert sur l’avenir

Dimanche 27 avril 2008 à Grenoble a eu lieu, comme tous les derniers dimanches d’avril, la Cérémonie Nationale du Souvenir de la Déportation. Et comme toutes les années depuis 5 ans, les homosexuel(le)s se sont rendus, nombreux, à ces cérémonies en arborant discrètement à la boutonnière un triangle rose et un triangle noir, signes d’infamie que portaient les déporté(e)s pour homosexualité dans les camps de concentration (rose pour les hommes, déportés au titre du Paragraphe 175, noir pour les femmes, déportées en tant qu’asociales).

En effet, pour la 5ème année consécutive, le Préfet de l’Isère a refusé que le Collectif Inter-associatif GAy et LEsbien de Grenoble (CIGALE) soit convié officiellement à ces commémorations et puisse déposer une gerbe à la mémoire des déportés homosexuels et de tous les déportés.

En apparence, donc, rien ne change.

Pourtant, nous sommes entrés dans la bagarre (et le combat sera peut-être long), mais aujourd’hui, contrairement à hier, ni le Préfet de l’Isère, ni le Directeur départemental des Anciens Combattants, ni les associations de déportés ne peuvent affirmer, comme par le passé, qu’il n’y a pas eu de déportation homosexuelle à partir du territoire français. Cela, mine de rien, est une grande avancée !

En effet, qu’avons-nous fait ?

D’abord, nous avons tenté de secouer le Landernau local. Forts de nos échecs précédents où nous ne contactions que le Préfet, nous avons cette année également envoyé des courriers au Directeur Départemental des Anciens Combattants, qui organise la cérémonie, et aux trois plus importantes associations de déportés : l’AFMD (Amis de la Fondation de la Mémoire de la Déportation), les Amis du Musée de la Résistance et de la Déportation, et l’Association Départementale des Déportés et Internés, Résistants Patriotes.

Le Directeur Départemental des Anciens Combattants a reçu Alida, la Présidente de CIGALE et un rendez-vous a été fixé avec le Président de l’AFMD... Enfin, au moins, nous existons ! On ne nous ignore plus, même si, sur le fond, les autorités campent sur leur position, à savoir :

- 1°) Nous ne sommes pas légitimes à porter la mémoire des homosexuels car nous ne sommes pas leurs descendants (! !!),
- 2°) Nous ne serons conviés aux commémorations qu’avec l’accord des autres associations de déportés.

Ensuite, nous avançons dans la compréhension du problème. Nous avons constitué un important dossier comprenant des informations historiques, des textes officiels, des articles de presse, des renseignements issus du milieu homosexuel d’autres villes, dossier qui nous est très utile dans nos négociations avec les différentes instances.

Il ressort de ces informations que l’obstacle principal qui se dresse à Grenoble est, comme bien souvent, un problème d’hégémonie. Je m’explique. Les associations d’anciens déportés de l’Isère ont la mainmise sur ces commémorations. Elles estiment qu’elles sont les seules légitimes à commémorer la déportation parce que seuls ses membres l’ont vécue eux-mêmes ou parce que leurs parents l’ont vécue. Dès lors, à partir du moment où nous n’avons pas prouvé qu’il a existé un ou une déporté(e) homosexuel(le) en Isère, nous n’avons pas notre place dans ces cérémonies... Etrange commémoration d’un événement planétaire mais qui ne devrait être porté que par la seule mémoire locale...

Enfin et peut-être surtout, nous avons alerté la presse : deux télévisions (France 3 Alpes et TéléGrenoble) ont toutes deux diffusé un reportage dans leur journal le vendredi 25 avril. De plus, les journalistes, qui ont été immédiatement acquis à notre cause, ont téléphoné à plusieurs reprises au Préfet de l’Isère pour avoir son point de vue. Celui-ci n’a pas voulu faire de déclaration publique... Preuve de son embarras !

Bref, les choses avancent, en souterrain, même si cela ne se voit pas encore au grand jour.

Pour l’année prochaine, il nous reste beaucoup à faire : continuer le dialogue avec les associations de déportés, continuer à sensibiliser la presse, prendre d’autres contacts, notamment avec les associations d’homosexuel(le)s d’autres villes qui ont été confrontées au même problème. Enfin, si tout cela ne suffit pas, contacter la Halde, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et l’Exclusion.

Car, c‘est bien là le plus important : la discrimination. Pourquoi tenons-nous tant à commémorer la déportation des homosexuel(le)s ? Après tout, certains pourraient dire : « Cela appartient au passé, il y a bien d’autres combats à mener aujourd’hui... ». Certes. Mais le présent n’est qu’une résultante du passé. Il n’y a pas de présent sans passé. Et si nous, aujourd’hui, dans nos associations, lors de nos permanences, nous entendons souvent des témoignages de personnes victimes d’actes homophobes ou lesbophobes, c’est bien parce qu’il y a eu un passé homophobe et lesbophobe.

Dire aujourd’hui à quelqu’un « sale juif », « sale youpin » est devenu complètement amoral. Et bien heureusement ! Mais combien aujourd’hui de « sales pédés », « sales pédales », « sales gouines » encore couramment admis ?

Alors, faisons la lumière sur ce passé peu glorieux et commémorons ses victimes. Ainsi, peut-être, la barbarie ne se reproduira pas. Peut-être...

Catherine D. Présidente des Voies d’Elles

Les lettres du prefet :

Les circulaires de 2005 :

Circulaire du 8 avril 2005 du MIDAC (Ministre Délégué aux Anciens Combattants) aux Préfets

"Liberté - Égalité - Fraternité/ République française / Ministère de la défense/ Le Ministre délégué aux Anciens Combattants/ Paris, le 08 avril 2005/ n°556A/ Le ministre délégué aux anciens combattants/ à/ Mesdames et messieurs les préfets/

Objet : Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation/ 60ème anniversaire de la libération des camps/

L’hommage que la France rend chaque année aux victimes et aux héros de la Déportation aura lieu, cette année, le dimanche 24 avril./ Pour marquer le 60ème anniversaire de la libération des camps de concentration et d’extermination, le Gouvernement souhaite donner une ampleur exceptionnelle à cette journée./ À Paris, le Président de la République présidera la principale cérémonie nationale. Dans votre département, conformément aux dispositions de la loi n°54-415 du 14 avril 1954, il vous appartiendra de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soient organisées les manifestations officielles. Vous ferez en sorte qu’elles revêtent cette année une solennité particulière. Vous voudrez bien inviter les maires à faire de même. Je vous saurais gré de ne pas ménager l’appui des autorités civiles et militaires. Je vous demande par ailleurs de veiller à ce que ces cérémonies permettent d’évoquer l’ensemble des victimes de la déportation. Toutes les associations qui les représentent doivent donc y être conviées./ Pour cette circonstance, j’adresserai un message aux anciens déportés et au monde combattant, que vous voudrez bien leur lire comme le veut l’usage pour ce type de manifestation patriotique./ Les bâtiments publics seront pavoisés aux couleurs nationales et une minute de silence et de recueillement sera observée sur tous les stades où se dérouleront des compétitions sportives./ Je souhaite que la population et, tout spécialement la jeunesse, soit très largement associée et puisse participer à cet hommage national. Cette journée du souvenir doit offrir l’opportunité d’organiser pour les élèves des établissements scolaires des rencontres avec les témoins de cette époque, permettant ainsi aux jeunes générations d’oeuvrer pour le devoir de Mémoire que nous devons aux victimes du nazisme./ Enfin, vous veillerez à ce que les manifestations, leur horaire, leur contenu, soient le mieux connus possible de la presse écrite et audiovisuelle, afin que le relais de l’information joue pleinement son rôle./ Si vous deviez rencontrer des difficultés dans l’organisation des cérémonies relevant de votre responsabilité, je vous saurais gré de bien vouloir m’en rendre compte sous le présent timbre./

Hamlaoui MEKACHERA".

Circulaire du 8 avril 2005 du Directeur Général de l’ONAC (Office Nationale des Anciens Combattants) aux Directrices et Directeurs des Services Départementaux des Anciens combattants

"Direction des Missions/ Département de la Mémoire Combattante/ ASP/FMC/2005 - N°278/ Paris, le 8 avril 2005/ Le Directeur Général/ à/ Mesdames et Messieurs les Directrices et Directeurs/ des services départementaux/ Objet : "Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation"/

Le 30 mars dernier, j’ai reçu monsieur David AUERBACH, secrétaire national de la Fédération française des centres gais et lesbiens et des bénévoles qui se destinent à l’accueil des personnes lesbiennes, gaies, bi et trans (INTER CENTRES LGBT) et monsieur Philippe COUILLET de l’association nationale civile homosexuelle du devoir de mémoire "Les "Oublié(e)s" de la Mémoire"./ Certains d’entre-vous ont aussi été sollicités par des associations portant le souvenir de la déportation homosexuelle partie de France*./ S’agissant d’associations rappelant la mémoire de personnes déportées en raison de leur homosexualité, il convient de prendre en compte leurs demandes :/ - en les tenant informées, d’une part, des décisions prises à l’occasion de réunions de préparation départementale de la "Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation" notamment le 24 avril prochain,/ - et d’autre part, de permettre à ces associations d’être invitées aux cérémonies selon un protocole à définir notamment en relation avec le Préfet de votre département./ Bien entendu vous ferez en sorte de préserver la dignité et la solennité qui sied à cette cérémonie d’hommage, rendue au nom de la Nation toute entière, aux victimes et aux héros de la déportation./ Si vous rencontrez des difficultés dans l’application de cette circulaire, je vous invite à en rendre compte à mademoiselle Anne-Sophie POTTIER, Chef du département de la mémoire combattante (01 49 55 62 38)./

Guy COLLET/

* Certains d’entre-vous ont déjà été sollicités par la Fédération nationale des Centres gais et lesbiens, le Collectif contre l’homophobie et pour l’égalité des droits, les "Oublié(e)s" de la mémoire, la Coordination InterPride France, les Flamands roses, Mélo’Men, les Gais et Lesbiennes branchés, "Aujourd’hui, autrement", "On est là !" et la Commission nationale LGBT des Verts".